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Immixtion fautive : le maître d’ouvrage doit être un professionnel de la construction, démontrant des connaissances et compétences techniques

Cass. Civ. 3ème,13 juillet 2022, n° 21-16.408 FS-B

L’immixtion fautive du maître de l’ouvrage est une cause d’exonération, ou d’atténuation, de la responsabilité des constructeurs.

Pour qu’elle soit retenue, il faut cependant d’une part, caractériser cette immixtion et d’autre part, établir la compétence notoire du maître de l’ouvrage dans la technique de la construction et du bâtiment.

La Cour de cassation a eu l’occasion de revenir, dans son arrêt du 13 juillet 2022, sur la notion de professionnel de la construction, en précisant que le seul objet social d’une société, qui porte le projet de construction, n’est pas un critère suffisant.

Dans cette affaire, les acquéreurs d’un lot au sein d’un lotissement, se sont plaints du projet de construction menée par une SCI, qui avait démoli une maison sur le lot voisin et fait édifier un immeuble.

Les acquéreurs ont assigné le maître d’ouvrage voisin ainsi que son maître d’œuvre, en invoquant une violation du cahier des charges du lotissement, aux fins d’obtenir à titre principal la démolition de l’ouvrage édifié et à titre subsidiaire, des dommages et intérêts.

La Cour d’appel a accordé des dommages et intérêts aux acquéreurs au titre de la violation du cahier des charges, les déboutant de leur demande de démolition de l’immeuble.

A cet égard, la Cour d’appel a condamné le maître de l’ouvrage de l’immeuble et son maître d’œuvre, en opérant un partage de responsabilité car elle a considéré que la SCI, même constituée entre époux, avait une compétence professionnelle certaine en matière de construction dès lors que son objet social était précisément d’acquérir et de construire tous biens immobiliers puis de les gérer.

Les acquéreurs ont formé un pourvoi en cassation, reprochant à la Cour d’appel de les avoir déboutés de leur demande de démolition de l’ouvrage.

Sur ce point, la Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel qui a retenu qu’il était disproportionné de demander la démolition de l’immeuble dans l’unique but d’éviter aux acquéreurs voisins le désagrément de ce voisinage, alors que l’immeuble avait été construit dans l’esprit du règlement de lotissement et n’occasionnait aucune perte de vue ni aucun vis-à-vis.

La violation du cahier des charges doit être sanctionnée par l’allocation de dommages et intérêts.

Par ailleurs, la SCI a formé un pourvoi incident, en faisant grief à l’arrêt d’appel d’avoir limité la responsabilité de son maître d’œuvre, en raison de la qualité professionnelle du maître d’ouvrage.

La Cour de cassation a alors infirmé l’arrêt d’appel, en considérant que, pour établir la qualité de professionnel de la construction, cela suppose des connaissances et des compétences techniques spécifiques, lesquelles ne pouvaient en l’’espèce se déduire du seul objet social de la SCI.

Il s’agit d’une solution en cohérence avec des arrêts antérieurs ayant retenu que la qualité de professionnel de la construction doit être réservée aux acteurs qui possèdent « les connaissances et les compétences techniques spécifiques » propres au domaine de la construction, qui sont « distinctes de celles exigées par la seule gestion immobilière » (Cass. 3ème civ., 7 novembre 2019, n°18-23.259 ; Cass. 3ème civ., 4 février 2016, n°14-29.347).

 

Chloé DUVIVIER

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