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Intérêt à agir contre un permis de construire : l’action en revendication de la propriété doit être suffisamment sérieuse

Conseil d’Etat 25 janvier 2023 Société Touche Automobiles, req. n° 445937

L’affaire portée devant le Conseil d’Etat pose la question de savoir, comme le formule le rapporteur public, « dans quelle mesure l’intérêt pour agir contre une autorisation d’urbanisme peut-il être reconnu au tiers qui, sans disposer d’un titre, revendique la propriété du terrain d’assiette ? ».

La réponse tient au sérieux de la revendication de la propriété du terrain d’assiette par le requérant.

On rappellera que l’ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l’urbanisme prise sur les conclusions du rapport Labetoulle a donné lieu à l’introduction dans le code de l’urbanisme de l’article L. 600-1-2 aux termes duquel un requérant bénéficie d’un intérêt à agir lorsque l’autorisation d’urbanisme est de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’il « détient ou occupe régulièrement ».

Le décret n° 2018-617 du 17 juillet 2018 a par suite introduit l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme imposant au requérant de produire, à peine d’irrecevabilité, des pièces destinées à justifier de sa qualité lui conférant un intérêt pour agir telles que son titre de propriété, sa promesse de vente, son bail, son contrat préliminaire ou encore « tout autre acte de nature à établir le caractère régulier de l’occupation ou de la détention de son bien par le requérant ».

Il y a lieu de revenir sur les circonstances de l’espèce pour comprendre la décision de la Haute juridiction.

La communauté de communes Aunis Atlantique avait procédé à la mise en vente d’une parcelle cadastrée ZT 0066, pour l’acquisition de laquelle la société Touche Automobiles et la société Lowima s’étaient montrées intéressées.

Après avoir informé les deux sociétés qu’elle entendait céder la parcelle à la société Lowima, la communauté de communes a pris une délibération fixant le prix de la parcelle à 35 euros par mètre carré.

La société Touche Automobiles a alors adressé à la communauté de communes une offre d’achat au prix puis, sans réponse de sa part, l’a faite assigner devant le tribunal judiciaire afin de voir juger parfaite la vente du terrain à son profit.

La parcelle a toutefois été cédée à la société Lowima qui a obtenu un permis de construire, contesté par la société Touche Automobiles.

Saisi de l’affaire, le Tribunal administratif de Poitiers a invité la société Touche Automobiles à justifier de sa qualité lui donnant intérêt pour agir en produisant l’une des pièces mentionnées à l’article R. 600-4 susvisé.

En réponse, la requérante a produit l’offre d’acquisition adressée à la communauté de communes ainsi que l’acte de saisine du tribunal judiciaire.

Ces seuls éléments n’ayant pas convaincu le Tribunal administratif ni la Cour administrative d’appel de la recevabilité de l’action, la société Touche Automobiles a saisi le Conseil d’Etat.

Celui-ci a toutefois confirmé la position des juridictions subordonnées en jugeant qu’ « une personne, entendant agir comme propriétaire d’un tel bien, qui ne fait état ni d’un acte de propriété, ni d’une promesse de vente, ni d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation ne justifie pas d’un intérêt de nature à lui donner qualité pour demander l’annulation d’une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le code de l’urbanisme, sauf à ce qu’elle puisse sérieusement revendiquer la propriété devant le juge compétent ».

Au cas présent, la seule offre au prix à laquelle la communauté de communes n’avait pas donné suite et l’assignation ne constituaient donc pas des éléments permettant de regarder la revendication de la propriété comme étant sérieuse.

Par suite, la société Touche Automobiles ne disposait pas d’un intérêt à agir à l’encontre du permis de construire contesté.

Marion REBIÈRE 

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