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Précisions sur la portée des dispositions de l’article L. 600-1-2 du Code de l’urbanisme sur l’intérêt à agir dans une zone naturelle peu urbanisée

CE 18 mars 2019 Commune de Mantségur-sur-Lauzon, req. n° 422460

A l’origine de cet arrêt du Conseil d’État du 18 mars 2019, le Tribunal administratif de Grenoble a été saisi d’un recours en annulation ainsi que d’une demande de référé suspension à l’encontre d’un permis de construire autorisant la transformation d’un bâtiment agricole en maison d’habitation, dans une zone très peu urbanisée, laissée à l’état naturel.

Le requérant était propriétaire d’une maison, située à environ 200 mètres du lieu du projet, et séparée de celui-ci par une parcelle boisée d’environ 67 mètres de longueur.

Le Tribunal avait fait droit à la demande de suspension de permis de construire et avait admis l’intérêt à agir du requérant en se fondant sur la distance entre sa maison et le projet, mais également en retenant, d’une part que les boisements entre la propriété et le projet ne suffisaient pas pour occulter toute vue et tout bruit, et d’autre part, que le requérant avait indiqué avoir acquis cette propriété en raison de l’absence de voisinage.

Saisi d’un pourvoi contre l’ordonnance du Tribunal, le Conseil d’État rappelle au premier chef le considérant de principe relatif à l’intérêt à agir, établi dans la décision du 10 juin 2015, Brodelle et Gino (req. n° 386121), selon lequel « il appartient à tout requérant qui saisit le juge administratif d’un recours pour excès de pouvoir tendant à l’annulation d’un permis de construire, de démolir ou d’aménager, de préciser l’atteinte qu’il invoque pour justifier d’un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d’affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s’il entend contester l’intérêt à agir du requérant, d’apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l’excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu’il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l’auteur du recours qu’il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu’il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci ».

Ayant rappelé les règles d’appréciation de l’intérêt à agir par le juge administratif, le Conseil d’État annule l’ordonnance pour erreur de droit. En effet, il énonce que les éléments retenus par le Tribunal administratif pour admettre l’intérêt à agir du requérant « n’étaient pas à eux seuls de nature à établir une atteinte directe aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance » de son bien par le propriétaire.

Jugeant l’affaire au fond, le Conseil d’État censure donc l’ordonnance du Tribunal administratif, rejette la demande de suspension et condamne le requérant en application de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative.

 

Marion Rebière

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