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Notion de projet au sens de l’article L. 122-1 du Code de l’environnement

Précisions sur la notion de projet au sens de l’article L. 122-1 du code de l’environnement et la régularisation du projet méconnaissant les dispositions d’un PLU relatives à sa desserte.

CE, 1er février 2021 Société Le Castellet-Faremberts, req. n° 429790

 

La société Le Castellet-Faremberts a obtenu, le 21 septembre 2016, un permis de construire en vue de la réalisation de 120 logements sociaux, d’une surface de plancher totale de 8 849 m².

 

Un permis de construire modificatif lui a ensuite été délivré le 23 janvier 2018.

 

Plusieurs requérants ont saisi le Tribunal administratif de Toulon d’un recours en annulation, auquel la juridiction a fait droit, dans un jugement en date du 14 février 2019 (n° 170864-182274), en se fondant sur deux motifs d’annulation.

 

Le jugement a été déféré à la censure du Conseil d’État.

 

En premier lieu, rappelons tout d’abord que l’article L. 122-1 III du Code de l’environnement dans sa version applicable au jour de la délivrance du permis de construire modificatif disposait :

 

« Lorsqu’un projet est constitué de plusieurs travaux, installations, ouvrages ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, il doit être appréhendé dans son ensemble, y compris en cas de fractionnement dans le temps et dans l’espace et en cas de multiplicité de maîtres d’ouvrage, afin que ses incidences sur l’environnement soient évaluées dans leur globalité ».

 

L’objectif de l’article L. 122-1 III est de permettre d’évaluer les incidences d’un projet dans leur globalité, en évitant un « saucissonnage » ou fractionnement des projets (cf. Guide d’interprétation de la réforme du 3 août 2016, page 21) qui aboutirait à faire échapper à l’évaluation environnementale des projets qui, pris individuellement, sont situés sous les seuils de l’article R. 122-2 mais qui concourent en réalité à un projet plus global qui serait, dans sa totalité, de nature à entrer dans les seuils fixés par cet article.

 

En effet, en application du tableau figurant en annexe de l’article R. 122-2 du même code, les travaux, constructions et opérations constitués ou en création qui créent une surface de plancher supérieure ou égale à 10 000 m² et inférieur à 40 000 m² et dont le terrain ne couvre pas une superficie supérieure ou égale à 10 hectares sont soumis à un examen au cas par cas permettant de déterminer s’ils doivent être soumis à évaluation environnementale.

 

C’est en se fondant sur ces dispositions que le Tribunal administratif de Toulon a estimé qu’il y avait lieu de considérer que le projet de la société Le Castellet-Faremberts devait être analysé comme formant un « projet global commun » avec un projet situé sur une parcelle voisine, pour une superficie d’environ 1 350 m² de surface de plancher.

 

D’après le tribunal, ensemble, ces opérations forment un projet au sens de l’article L. 122-1 III précité, qui, dépassant au global les 10 000 m² de surface de plancher, devait être soumis à un examen au cas par cas pour déterminer s’il devait être soumis à étude d’impact.

 

Pour retenir une telle acception de la notion de projet, le tribunal administratif se fonde sur le fait que les deux projets ont une finalité identique (la construction de logements), que deux passages mènent de la parcelle du terrain de la société pétitionnaire à la parcelle voisine, et que les deux projets s’inscrivent dans le projet d’urbanisation de la zone prévu par le PLU.

 

Le Conseil d’État censure cette analyse, au motif que le Tribunal n’a pas recherché « s’il existait entre eux des liens de nature à caractériser le fractionnement d’un projet unique ».

 

En jugeant ainsi, le Conseil d’État s’inscrit dans la lignée d’une jurisprudence antérieure de 2018 (req. n° 419315) à l’occasion de laquelle il avait censuré l’ordonnance qui avait admis que le projet à prendre en compte pour déterminer s’il devait être soumis à évaluation environnementale n’était pas le seul projet de lotissement pour lequel une autorisation d’urbanisme avait été délivrée, mais l’ensemble du projet d’urbanisation de la zone au sein de laquelle le projet s’inscrivait, dans la mesure où la modification du PLU avait prévu l’aménagement d’une zone en plusieurs étapes, et que le lotissement constituait la première de ces étapes.

 

L’exigence de « liens de nature à caractériser le fractionnement d’un projet unique » parait en outre cohérente avec le guide d’interprétation de la réforme du 3 août 2016, qui évoque le fait que « le projet doit donc être appréhendé comme l’ensemble des opérations ou travaux nécessaire pour le réaliser et atteindre l’objectif poursuivi », et propose comme exemple la construction d’un stade nécessitant un défrichement et la réalisation de voies pour le desservir.

 

En second lieu, le Tribunal administratif de Toulon, après avoir rappelé les exigences de l’article 3 du règlement de zone concernant la largeur de la voie de desserte des constructions, a considéré que le calendrier de réalisation de l’élargissement de la voirie n’était pas établi en l’absence de programmation par les collectivités publiques compétentes.

 

Le Conseil d’État sur ce point rappelle sa jurisprudence constante selon laquelle « la conformité d’un immeuble à de telles prescriptions d’un plan local d’urbanisme s’apprécie non par rapport à l’état initial de la voie mais en tenant compte des prévisions inscrites dans le plan local d’urbanisme à l’égard de celle-ci et des circonstances de droit et de fait déterminantes pour leur réalisation qui doit être certaine dans son principe comme dans son échéance de réalisation ».

 

Il ajoute néanmoins, après avoir constaté que le tribunal n’avait pas dénaturé les faits, que l’absence de caractère certain de la date d’échéance des travaux d’élargissement de la voirie pouvait faire l’objet d’une mesure de régularisation en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme.

 

Le Conseil d’État annule donc le jugement du Tribunal administratif de Toulon et y renvoie l’affaire.

 

 

 

Marion REBIÈRE

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