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Pollution des sols : l’obligation d’information du vendeur d’un terrain inclus dans le périmètre d’une installation classée

Cass. Civ. 3ème, 21 septembre 2022, n°21-21.933, publié au bulletin

Au moment de la conclusion du contrat de vente, le vendeur a l’obligation de fournir à l’acheteur toutes les informations essentielles du bien ou service, objet de la vente.

L’article L.514-20 du code de l’environnement fait peser sur le vendeur une obligation spécifique à la pollution des sols.

Pour mémoire, l’article L. 514-20 du code de l’environnement impose au vendeur l’obligation d’informer l’acheteur, d’une part, qu’une installation soumise à autorisation a été exploitée sur un terrain et, d’autre part, des dangers qui résulteraient de cette exploitation, s’il en a connaissance.

L’article stipule également, qu’à défaut d’avoir satisfait à cette obligation d’information, l’acquéreur a le choix de poursuivre la résolution de la vente ou de se faire restituer le prix de la vente.

Il peut également demander la remise en état du site aux frais du vendeur, si le coût de celle-ci n’est pas disproportionné par rapport au prix de vente.

Un arrêt en date du 21 septembre 2022 rendu par la Cour de cassation se prononce sur l’étendue du devoir d’information incombant au vendeur au titre de cet article L. 514-20 du code de l’environnement.

En l’espèce, après avoir acquis un terrain sur lequel se trouvaient d’anciennes constructions, un établissement public découvre dans les souterrains, des traces de pollution industrielle nécessitant d’être traitées en tant que déchets dangereux.

La particularité de l’affaire résidait dans le fait que l’activité classée n’avait pas été exercée sur la parcelle cédée : le terrain vendu constituait l’entrée de l’ancienne usine soumise à autorisation et abritait la maison du gardien.

La Cour d’appel a rejeté les demandes en paiement de l’établissement public formées contre le vendeur, lesquelles étaient présentées alternativement sur les fondements suivants :

  • Le dol du vendeur (article 1137 du code civil) ;
  • La garantie des vices cachés (article 1641 du code civil) ;
  • Le manquement à l’obligation de délivrance conforme (article 1604 du code civil) ;
  • L’article L. 514-20 du code de l’environnement.

C’est dans ces conditions que l‘établissement public a formé un pourvoi en cassation contre la décision d’appel.

La Cour de cassation a rejeté les moyens du pourvoi fondés sur le dol, la garantie des vices cachés et le manquement à l’obligation de délivrance conforme.

Elle retient qu’il résultait des constatations de la Cour d’appel que l’acquéreur n’ignorait ni l’exploitation passée ou la proximité d’une installation soumise à autorisation d’activités entrainant des dangers ou inconvénients pour la santé de l’environnement et qu’était démontrée que la pollution d’un site voisin avait été portée à sa connaissance par l’acquéreur.

Autrement dit, l’acquéreur était informé de la nature et de l’ampleur de la pollution des sols avant la vente.

Cependant, la Cour de cassation accueille le pourvoi au titre de son quatrième moyen fondé sur l’application de l’article L. 514-20 du code de l’environnement.

La Cour d’appel avait écarté l’application de cet article au motif que la preuve n’était pas rapportée qu’une activité classée avait été exercée sur les parcelles cédées à l’acquéreur, celles-ci ayant abrité « depuis 1926 une maison à usage de logement ».

Néanmoins, comme cela ressortait de ses propres constatations, la parcelle cédée servait d’entrée de l’usine exploitée de 1893 à 1961 pour une activité de traitement de déchets d’usines à gaz qui faisait ressortir du soufre noir.

La Cour de cassation retient par conséquent que le terrain vendu se trouvait dans le périmètre de l’installation classée soumise à autorisation.

La Haute juridiction fait ainsi application d’une interprétation extensive de l’obligation d’information de l’article L. 514-20 du code de l’environnement, cette dernière s’imposant non seulement dans le cadre des ventes portant sur des parties du site sièges des activités relevant du régime de l’autorisation, mais également sur la vente de tout terrain voisin issu de la division de ce site.

On peut relever qu’il s’agit manifestement d’un revirement de jurisprudence dans la mesure où, dans un cas d’espèce similaire (Cass. Civ. 3ème 22 novembre 2018, n°17-26209), la Cour de cassation avait adopté la solution inverse : la Cour avait alors pris le parti d’appliquer de façon restrictive cette obligation d’information considérant qu’il était nécessaire, pour son application, qu’une installation classée ait été implantée, en tout ou partie, sur le terrain vendu.

Le vendeur de terrains anciennement inclus dans le périmètre d’une parcelle ayant accueilli une installation classée soumise à autorisation devra désormais être particulièrement vigilant quant aux informations données à l’acquéreur : les termes de l’article L. 514-20 du code de l’environnement ne pourront plus être écartés au motif que l’activité classée n’a pas été exercée, stricto sensu, sur la parcelle cédée.

 

Jean-Philippe PELERIN et Ines N’DOUME

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