Cass. Civ. 3ème, 13 avril 2023, n°22-11.024
L’arrêt de la Cour de cassation commenté vient illustrer les conditions dans lesquelles la responsabilité de l’Assistant à Maîtrise d’ouvrage peut être recherchée.
Le rôle de cet intervenant varie, selon les termes de son contrat et les missions confiées, plus ou moins étendues, de la simple assistance à l’élaboration du programme de construction, en soutien au Maître d’Ouvrage, à des missions plus larges de conseil, voire de conception technique de l’ouvrage.
Ainsi, du périmètre de ces missions dépendra la qualification – ou non – de ce contrat en louage d’ouvrage et donc sa soumission – ou non – au régime de la responsabilité décennale des constructeurs.
Dans cette espèce, il est question de la construction d’un ensemble immobilier à usage d’habitation situé dans une station de ski des Pyrénées et donc destiné principalement à une occupation saisonnière.
Le Maître d’Ouvrage de cette opération avait fait appel, pour les besoins du projet, à un assistant à maîtrise d’ouvrage dont les termes du contrat prévoyaient qu’il était notamment chargé d’une mission « Haute Qualité Environnementale ».
Rapidement après la réception, des dysfonctionnements de l’installation de production centralisée d’eau chaude sanitaire, et spécialement du système de production d’eau chaude sanitaire solaire, sont apparus.
Saisi de l’examen de ces désordres, un expert judiciaire a finalement conclu, aux termes d’un rapport déposé le 6 novembre 2007, à la réalité des désordres allégués et a préconisé le remplacement total de l’installation de chauffage mise en œuvre.
Il indique à cette occasion que les dommages sont la conséquence d’un choix de technologie inadapté à son environnement, à savoir l’utilisation de panneaux solaires pour couvrir les besoins de chauffage d’une résidence essentiellement occupée en hiver, à une période où l’ensoleillement est le plus faible.
En première instance, comme en appel, il avait été jugé que ce choix était imputable majoritairement à l’Assistant à Maîtrise d’ouvrage.
Contestée devant la Cour de cassation, cette position reposait notamment sur le fait que la mission « Haute Qualité Environnementale » confiée à l’Assistant à Maîtrise d’ouvrage, manifestement décrite de manière ambiguë dans le contrat, incluait nécessairement une mission de programmation mais également de conception et de suivi de la réalisation des ouvrages de production d’énergie.
Aux termes de l’arrêt attaqué, le pourvoi formé par l’Assistant à Maîtrise d’ouvrage, au motif de la dénaturation des termes du contrat, est rejeté.
La Cour de cassation retient que c’est à bon droit que les juges du fond ont procédé à l’interprétation des termes du contrat d’assistance à maîtrise d’ouvrage, imprécis quant au contenu de la mission « Haute Qualité Environnementale », et ont retenu ainsi que cette mission portait notamment sur le conseil sur l’adaptation de l’ouvrage à sa localisation.
En définitive, c’est bien un mauvais choix de conception qui est attribué à l’Assistant à Maîtrise d’ouvrage, lequel a engagé sa responsabilité décennale, en tant que locateur d’ouvrage.
Tanguy HUERRE
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