CE 18 novembre 2024 Société Alliade Habitat, req. n° 489066
Si les autorisations d’urbanisme doivent être conformes au règlement du plan local d’urbanisme, elles doivent également être compatibles avec les OAP lorsque celles-ci existent (L. 152-1 c. urb.).
Récemment, le Conseil d’Etat s’est efforcé d’apporter un cadre et un guide méthodologique d’interprétation de la notion assez insaisissable de « compatibilité ». Il l’a fait à l’occasion de la décision du 31 décembre 2021 Commune de Lavérune, req. n° 446763, et en offre une nouvelle illustration par la décision commentée du 18 novembre 2024.
Dans cette affaire, un permis de construire portant sur la réalisation de trois bâtiments d’habitation avait été partiellement annulé par le Tribunal administratif, notamment au motif de son incompatibilité avec l’OAP. En effet, l’OAP prévoyait qu’une « part importante des surfaces de plancher aménagées dans le cadre du renouvellement potentiel des parcelles longeant la route du Prieuré, au nord du périmètre, devra[it] ainsi permettre l’accueil d’activités de services » Le Tribunal en a alors conclu qu’en ne prévoyant aucune surface de plancher pour des activités de service au sein du projet, le permis de construire se rendait incompatible avec les objectifs fixés par l’OAP.
Le Conseil d’Etat censure ce raisonnement en énonçant qu’« il résulte de ces dispositions qu’une autorisation d’urbanisme ne peut être légalement délivrée si les travaux qu’elle prévoit sont incompatibles avec les orientations d’aménagement et de programmation d’un plan local d’urbanisme, et, en particulier, en contrarient les objectifs. Cette compatibilité s’apprécie en procédant à une analyse globale des effets du projet sur l’objectif ou les différents objectifs d’une orientation d’aménagement et de programmation, à l’échelle de la zone à laquelle ils se rapportent ».
Au cas d’espèce, la Haute Juridiction considère que le Tribunal administratif a commis une erreur de droit « en jugeant que le permis litigieux n’était pas compatible avec cette orientation d’aménagement et de programmation au seul motif qu’il prévoit la création de dix-sept logements à usage d’habitation répartis dans trois bâtiments sans qu’une partie des surfaces de plancher créées en rez-de-chaussée ne permette l’accueil d’activités de services, sans rechercher si les effets de ce projet devaient être regardés comme suffisants pour contrarier, par eux-mêmes, les objectifs de l’orientation d’aménagement et de programmation à l’échelle de la zone à laquelle cette orientation se rapportait ».
On doit donc en comprendre que l’appréciation de la compatibilité d’un projet avec une OAP implique de savoir si les effets du projet pourraient, par eux-mêmes, contrarier les objectifs de l’OAP en procédant à une analyse globale, et ce à l’échelle de la zone couverte par l’OAP et non du seul projet.
Le Conseil d’Etat ne tranche pas l’affaire au fond et après avoir annulé le jugement, renvoie au Tribunal administratif de Lyon.
Marion REBIERE
Credit photo : @ Image libre de droit publiée sur pexels le 31 octobre 2019



