CE 20 juillet 2023, Société Développement d’études foncières et immobilières, req. n° 467318, mentionné dans les tables du recueil Lebon
Par une décision rendue le 20 juillet 2023, mentionnée dans les tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat précise que la seule injonction du juge des référés faite à une commune de réexaminer une demande de permis de construire ne fait pas courir un délai de nature à faire naître une autorisation tacite.
En l’espèce, le Maire des Deux Alpes avait, par un arrêté en date du 2 décembre 2021, refusé de délivrer un permis de construire pour un projet de construction d’un immeuble collectif d’habitation en remplacement d’un hôtel existant.
Saisi d’un recours, le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble a, par ordonnance du 12 janvier 2022, suspendu l’exécution de l’arrêté de refus de permis de construire et enjoint à la commune de réexaminer la demande de permis.
Estimant qu’un permis de construire tacite serait né du silence gardé par la commune à la suite de l’ordonnance du 12 janvier 2022, le Maire des Deux Alpes a, par un arrêté du 8 juillet 2022, indiqué retirer le permis tacite.
Le pétitionnaire a alors de nouveau saisi le juge des référés d’une demande, cette fois, tendant à suspendre l’exécution de la décision de retrait du 8 juillet 2022 et enjoindre à la commune de lui délivrer un certificat de permis de construire tacite.
Par une ordonnance du 22 août 2022, le juge des référés a toutefois rejeté sa demande.
La société pétitionnaire s’est alors pourvue en cassation.
Dans la décision commentée, le Conseil d’Etat précise, en premier lieu, que :
« Il ne résulte d’aucun texte ni d’aucun principe que la seule injonction faite à la commune par le juge des référés du tribunal administratif (…) de réexaminer la demande de permis de construire de cette société, aurait fait courir un délai de nature à faire naître une autorisation tacite. »
Il en résulte que l’absence de réponse de l’administration à la suite d’une injonction du juge des référés de réexaminer une demande de permis de construire ne fait pas naître une décision tacite.
Faisant application de ce principe, le Conseil d’Etat considère donc que la décision en date du 8 juillet 2022 doit être regardée, non pas comme un retrait de permis de construire dont la société pétitionnaire serait devenue titulaire, mais comme un refus de permis de construire.
Au fond, le Conseil d’Etat s’est déjà prononcé en ce sens en jugeant que si l’annulation d’une décision de refus de permis de construire impose à l’administration de procéder à une nouvelle instruction de la demande de permis, l’annulation ne fait pas, sauf confirmation de sa demande de permis par le pétitionnaire, courir un délai de nature à faire naître une autorisation tacite (CE 28 décembre 2018, VTMA, req. n° 402321, mentionné dans les tables du recueil Lebon).
En second lieu, le Conseil d’Etat se prononce sur la demande en référé suspension contre la décision de refus de permis de construire du 8 juillet 2022.
Jugeant que les conditions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative sont réunies, le Conseil d’Etat, d’une part, annule l’ordonnance du 22 août 2022 du juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble, d’autre part, suspend l’exécution de l’arrêté de refus de permis de construire du 8 juillet 2022 et, enfin, enjoint à la commune de se prononcer de nouveau sur la demande de permis de construire présentée par la société pétitionnaire dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Marie HY
Credit photo : Kévin Matos @ Image libre de droit publiée sur unsplash le 19 octobre 2017