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Conseil d’Etat, 17 juin 2024, Société Rondis et a., req. n° 471711

 

Alors que la jurisprudence administrative favorisait jusqu’à présent la régularisation des autorisations d’urbanisme, le Conseil d’Etat a, par une décision rendue le 17 juin 2024, affirmé que cette régularisation ne pouvait être acquise que si l’autorisation modificative a pour objet la régularisation du vice et non pas seulement pour effet de régulariser le vice.

En l’espèce, l’adjoint au maire de la commune de Belfort a, par un arrêté en date 6 décembre 2019, délivré à la société immobilière européenne des Mousquetaires un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale en vue de la création d’un supermarché.

Par un arrêté en date du 15 décembre 2020, le même adjoint, lequel a entretemps bénéficié d’une délégation de signature régulièrement consentie, a délivré à la société pétitionnaire un permis de construire modificatif portant sur l’augmentation du volume du bâtiment et le déplacement d’une porte.

Saisi d’un recours, la Cour administrative d’appel de Nancy a considéré que le permis de construire modificatif « a régularisé le vice d’incompétence » qui affectait le permis de construire initial « alors même que cet arrêté modificatif n’a pas été pris dans un but de régularisation et n’a eu pour objet et pour effet de ne modifier qu’une partie du permis de construire initialement accordé » (CAA Nancy 29 décembre 2022, req. n° 20NC00260).

Dans la décision commentée, le Conseil d’Etat censure toutefois cette analyse en opérant une distinction entre une autorisation ayant pour objet la régularisation et une autorisation ayant pour effet la régularisation.

Plus précisément, après avoir rappelé qu’un permis de construire modificatif peut avoir pour effet de régulariser un vice de légalité tant externe qu’interne, ce dernier affirme cependant que tel ne peut être le cas que si l’objet dudit permis modificatif est précisément cette régularisation.

Ainsi, la Haute juridiction en conclut que :

« En déduisant ainsi de la seule circonstance que le permis de construire modificatif avait été délivré par l’autorité compétente qu’il pouvait être regardé comme ayant régularisé le vice d’incompétence dont était entaché le permis initial, alors qu’il lui appartenait de rechercher s’il résultait des pièces du dossier, tels que la chronologie dans laquelle s’inscrivait la demande de permis modificatif ou les échanges intervenus avec la commune à l’occasion de son instruction, que ledit permis modificatif avait eu en l’espèce cet objet de régularisation, la cour administrative d’appel de Nancy a entaché son arrêt d’erreur de droit. »

En pratique, pour que le permis de construire modificatif résultant d’une démarche spontanée du pétitionnaire ait un effet régularisateur, la demande déposée devra donc expressément mentionner que ledit permis est sollicité à cet effet ; la question se pose alors de savoir ce qui devra être précisément mentionné dans la demande.

Il importe de relever qu’il en va différemment s’agissant d’une demande de permis de construire modificatif résultant d’une décision du juge administratif prise sur le fondement de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme.

En effet, dans cette hypothèse, le Conseil d’Etat semble avoir retenu, aux termes d’une décision rendue le 30 juin 2023, qu’un permis modificatif puisse régulariser une autorisation initiale même si la régularisation n’avait pas été formellement demandée (CE, 30 juin 2023, req. 463230).

 

Marie HY

Credit photo : @ Image libre de droit publiée sur pexels

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