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Garantie des vices cachés : certains désordres apparents avant la vente peuvent se transformer en vice

Cass. Civ. 3ème, 14 septembre 2023, n°22-16.623

 

Dans cette affaire, des particuliers ont acquis une maison avec piscine.

A la suite d’apparition de fissures sur les murs et façades de la maison ainsi que sur la piscine, une expertise judiciaire a été diligentée.

Postérieurement au dépôt par l’expert judiciaire de son rapport, les acquéreurs ont assigné leurs vendeurs aux fins d’indemnisation de leurs préjudices sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Condamnés au stade de l’appel, les vendeurs ont formé un pourvoi afin de faire valoir que les fissures étant apparentes lors de la vente, ils n’étaient donc pas tenus de les garantir, quand bien même les acquéreurs n’en avaient pas mesuré l’ampleur ni les conséquences, faute pour eux d’avoir recherché l’origine du vice.

Cet arrêt est l’occasion pour la Cour de cassation de revenir sur la notion de vice apparent ainsi que la distinction entre profanes et professionnels en matière de vente immobilière.

 

  1. Mobilisation de la garantie des vices cachés en l’absence de connaissance de l’ampleur et de l’étendue du vice lors de la vente

Les vendeurs ont soutenu que les acquéreurs avaient pu constater, lors des visites préalables à la vente, la présence de traces de fissures et qu’en conséquence, la garantie des vices cachés ne pouvait être mobilisée.

La Haute juridiction confirme néanmoins l’arrêt d’appel en ce que ce dernier a constaté que les fissures avaient pour origine l’inadaptation des fondations au sol d’assise, qui supposait une période d’observation d’au moins une année pour être mise en évidence.

Ainsi, et même si les acquéreurs ont pu constater la présence de traces de fissures préalablement à la vente, ils ne pouvaient « n’étant ni professionnels du bâtiment ni tenus de se faire accompagner par un homme de l’art, se convaincre du vice dans son ampleur et ses conséquences ».

En conclusion, le fait, pour les acquéreurs, profanes, de ne pas connaître le vice dans son ampleur et ses conséquences suffit à justifier de l’absence de caractère apparent du vice.

 

  1. Jurisprudence plus indulgente à l’égard du profane quant à l’appréciation du caractère caché du vice

Le vice apparent est celui qui peut être décelé sans l’aide d’un professionnel ou d’un homme de l’art (Cass. Civ. 3ème, 4 février 2004, n°02-18.029).

Si l’on attend de l’acheteur profane qu’il soit diligent, ce devoir sera limité aux vérifications élémentaires.

Ainsi, l’acquéreur profane n’est pas tenu de s’entourer de l’avis d’un homme de métier pour constater l’état de l’immeuble qu’il achète et aucune négligence ne peut être retenue contre lui pour ne pas l’avoir fait (Cass. Ass. Plén., 27 octobre 2006, n°05-18.977).

Toutefois, si le profane est accompagné d’un professionnel préalablement à l’achat du bien immobilier, les juges peuvent souverainement en déduire le caractère apparent du vice (Cass. Civ. 3ème, 12 novembre 2020, n°19-22.878).

A contrario, si l’acquéreur est lui-même un professionnel de la construction, alors il est réputé connaître tous les vices que sa compétence technique lui permet de découvrir.

Son action contre le vendeur n’est alors recevable que s’il démontre l’existence d’un dol ou s’il prouve que, même en présence d’un professionnel, le vice était indécelable (Cass. Civ. 3ème, 7 février 1973, n°71-13.568).

Cet arrêt s’inscrit donc dans le prolongement d’une jurisprudence désormais établie qui considère que l’acquéreur d’un bien immobilier, profane, n’est pas tenu de procéder à des investigations approfondies lors de la visite du bien ou de se faire accompagner par un homme de l’art pour mobiliser la garantie des vices cachés.

Blanche LAMOUR DE CASLOU

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