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Obligation pour le juge d’examiner le caractère abusif d’une clause de conciliation

Cass. Civ. 3ème, 19 janvier 2022, pourvoi n°21-11.095

Par un arrêt en date du 19 janvier 2022, la Cour de cassation est venue confirmer que la clause figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur rendant obligatoire le recours à un mode alternatif de règlement des litiges est présumée abusive et ce, même en l’absence de contestation par le consommateur.

Dans l’hypothèse où ce dernier ne soulève pas le caractère litigieux de la clause, il appartient au juge de relever d’office son caractère abusif et d’en écarter l’application si, après avoir recueilli les observations des parties, ce caractère abusif ressort des débats.

En l’espèce, un Maître d’ouvrage a entrepris la réhabilitation d’un logement d’habitation aménagé en partie dans une ancienne cave.

Le Maître d’ouvrage a, par contrat en date du 6 novembre 2012, confié à une société la maîtrise d’œuvre de ces travaux.

Après achèvement des travaux, le Maître d’ouvrage a donné à bail à un locataire l’appartement réhabilité.

Ce dernier, se plaignant de la forte humidité affectant le logement, a assigné le Maître d’ouvrage en exécution de travaux et réparation de ses préjudices.

Le Maître d’ouvrage a assigné en garantie les intervenants à l’acte de construire, dont la société en charge de la maîtrise d’œuvre.

Le contrat de maîtrise d’œuvre en date du 6 novembre 2012 conclu entre le maître d’œuvre, professionnel, et le maître d’ouvrage, consommateur, prévoyait dans son article 3.13 que : « en cas de litige portant sur l’exécution du contrat, les parties conviennent de saisir et de se soumettre à la commission de conciliation de l’association Franche-Comté consommateurs, et ce avant toute procédure judiciaire, sauf éventuellement mesures conservatoires. A défaut d’un règlement amiable le litige sera du ressort des juridictions compétentes ».

En cause d’appel, le maître d’œuvre soutenait que l’appel en garantie formé par le Maître d’ouvrage à son encontre était irrecevable, faute de saisine préalable de la commission de conciliation visée à l’article 3.13 du contrat de maîtrise d’œuvre.

La cour d’appel de Besançon a déclaré irrecevable le Maitre d’ouvrage à agir à l’encontre du maitre d’œuvre, en raison du non-respect de la clause aux termes de laquelle les parties s’engageaient, en cas de litige sur l’exécution du contrat, à saisir la commission de conciliation, avant toute procédure judiciaire.

Le Maître d’ouvrage a formé un pourvoi favorablement accueilli par le Cour de cassation sur deux points.

D’abord, sur le fondement combiné des dispositions des articles L. 212-1 et R. 212-2 du Code de la consommation, la Cour de cassation rappelle le principe selon lequel « la clause, qui contraint le consommateur, en cas de litige avec un professionnel, à recourir obligatoirement à un mode alternatif de règlement des litiges avant la saisine du juge, est présumée abusive, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire »

L’article 750-1 du Code de procédure civile impose, à peine d’irrecevabilité, d’avoir recours à un mode alternatif de résolution du litige préalablement à la saisine du juge.

Cependant, cette disposition laisse le choix du mode de résolution amiable : conciliation, médiation ou tentative de procédure participative.

Le mode de résolution ne peut donc pas être imposé au consommateur.

Cette position repose sur une interprétation extensive de l’article R. 212-2, 10° du Code de la consommation.

Ensuite, se fondant sur l’article R. 632-1 du Code de la consommation, la Cour de cassation a jugé que, même en l’absence de contestation de la clause litigieuse par le consommateur, il appartient au juge de soulever d’office son caractère abusif et d’en écarter l’application si, après avoir recueilli les observations des parties, ce caractère abusif ressort des débats.

Avec cette décision, la 3ème chambre confirme l’harmonisation par la Cour de cassation de sa jurisprudence, avec des décisions jusqu’alors principalement rendues par les 1ère et 2ème chambres civiles (Cass. Civ. 1ère, 16 mai 2018, n° 17-16.197 ; Cass. Civ. 1ère, 16 mai 2018, n° 17-11.337 ; Cass. Civ. 1ère, 12 septembre 2018, n° 17-17.650 ; Cass. Civ. 2ème, 14 octobre 2021, n° 19-11.758, FS-B+R).

Agathe RAFFIN

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