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Précisions sur la régularisation des autorisations d’urbanisme

Précisions sur la régularisation des autorisations d’urbanisme prévue par l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme

CE 2 octobre 2020, Avis n° 438318, publié au Recueil Lebon

 

Dans cet avis contentieux rendu le 2 octobre 2020, le Conseil d’État, saisi par le Tribunal administratif de Pau, apporte des précisions sur l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme dans sa rédaction issue de la loi ELAN du 23 novembre 2018.

Plus précisément, il explicite, d’une part, l’obligation du juge de surseoir à statuer lorsqu’un vice entachant une autorisation d’urbanisme est régularisable et, d’autre part, la nature du vice régularisable.

Pour mémoire, l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme prévoit que lorsque le juge constate qu’un vice affectant la légalité d’une autorisation d’urbanisme est susceptible d’être régularisé, il lui appartient de surseoir à statuer sur la demande d’annulation dont il est saisi, après avoir invité les parties à présenter leurs observations.

Sur le fondement de ces dispositions, le Conseil d’État précise tout d’abord que, lorsque les conditions sont réunies, le juge administratif a l’obligation de surseoir à statuer sur le recours dont il est saisi.

Il fixe ensuite les limites de cette obligation en admettant que le juge n’y est pas tenu, d’une part, lorsque les conditions de l’annulation partielle, prévue à l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme sont réunies et qu’il préfère y recourir ou, d’autre part, lorsque le pétitionnaire ne souhaite pas en bénéficier.

Par ailleurs, et surtout, le Conseil d’État précise, pour la première fois, que :

« Un vice entachant le bien-fondé de l’autorisation d’urbanisme est susceptible d’être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l’économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d’urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n’implique pas d’apporter à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même ».

Ce faisant, le permis de construire objet d’un recours contentieux est désormais régularisable et ce même si la régularisation implique de modifier, voire de bouleverser, l’économie générale du projet, à condition toutefois de ne pas changer la nature du projet.

Si la solution du Conseil d’État répond à l’objectif de la loi ELAN du 23 novembre 2018 visant à sécuriser les permis de construire, reste à définir la frontière entre les modifications qui impliquent de revoir l’économie générale d’un projet et celles qui changent la nature même de ce projet…

Dans ses conclusions sur l’avis commenté, le Rapporteur public, Monsieur FUCHS, donne quelques pistes de réflexion sur ce point et propose de « prendre en compte plusieurs indices relatifs au projet, notamment sa destination, ses dimensions, son implantation ou encore les caractéristiques principales de son insertion dans l’environnement. L’important est que les modifications qui devraient être apportées à ces éléments soient telles qu’elles conduisent à rompre le lien avec le permis initial ».

Selon lui, si le Conseil d’État a jugé, à l’occasion de jurisprudences rendues en matière de permis de construire modificatif, que constituaient une atteinte à l’économie générale du projet les modifications visant notamment à :

  • surélever un bâtiment d’un étage, passant de 40 à 27 logement, et à supprimer les locaux commerciaux initialement prévus (CE 5 juillet 1978, SCI du Château, req. n° 01492),
  • à augmenter la pente d’une toiture et la surface hors œuvre nette de 200 à 300 m² d’un entrepôt de fruits et légumes (CE 1er décembre 1993, Ville de Beaune, req. n°110339),
  • réduire la distance d’implantation d’une construction par rapport à l’alignement passant de 11 à 6 mètres (CE 30 mai 1994, Commune de Châtel-Saint-Germain, req. n°112794)… etc.

Pour autant, de telles modifications ne rompraient pas le lien avec le projet initial. Autrement dit, si l’on suit le Rapporteur public, les mesures ci-dessus évoquées entrent désormais dans le champ de la mesure de régularisation de l’article L 600-5-1 du code de l’urbanisme.

A l’inverse, il indique que les modifications visant, par exemple, à transformer un projet de trois immeubles collectifs en une villa individuelle ou à réaliser un projet, dans une zone et sur une parcelle, différentes, bouleverseraient la nature du projet initial et rompraient, de fait, le lien avec celui-ci.

Outre ces premières pistes de réflexion, dans la mesure où le Conseil d’État est resté silencieux sur ce point, des précisions jurisprudentielles sont à prévoir !

 

Marie HY

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