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Le vendeur d’immeuble à construire responsable de plein droit à l’égard de l’acquéreur ne conserve, dans ses recours à l’encontre des constructeurs, une part de la dette de réparation qu’en cas de faute, immixtion ou une prise délibérée du risque caractérisée à son encontre

Cass. Civ. 3ème, 14 décembre 2022, 21-19.377, Inédit

Le vendeur d’immeuble à construire est redevable des garanties légales des articles 1792 et suivants du Code civil.

Sa responsabilité peut, ainsi, être engagée de plein droit à l’égard de l’acquéreur.

Néanmoins, le vendeur de l’immeuble à construire dispose, en sa qualité de maître d’ouvrage, de recours à l’encontre des constructeurs et des responsables directs du désordre, sur le fondement des garanties légales, mais également sur le terrain contractuel ou de droit commun.

A cet égard, la Cour de cassation a eu l’occasion de confirmer, dans son arrêt du 14 décembre 2022, que le vendeur d’immeuble à construire condamné à réparation au titre d’une responsabilité de plein droit ne peut, dans ses recours contre les constructeurs, conserver à sa charge une part de la dette de réparation que si une faute, une immixtion ou une prise délibérée du risque est caractérisée à son encontre.

Dans ce cas d’espèce, une société civile immobilière avait été assignée en sa qualité de venderesse en l’état futur d’achèvement par les acquéreurs de l’immeuble, car ces derniers se plaignaient de désordres affectant le câblage du réseau informatique, ne permettant pas à celui-ci d’atteindre le débit contractuellement garanti.

La société civile immobilière avait donc appelé en garantie les intervenants à l’acte de construire et leurs assureurs.

Cependant, la Cour d’appel n’avait accueilli que partiellement le recours de la société civile immobilière à l’encontre des constructeurs fautifs et elle avait laissé à sa charge 20 % de la dette de réparation, retenant que cette dernière était responsable d’une « non-conformité contractuelle fondamentale ».

La Cour d’appel avait retenu que le premier élément ayant contribué aux désordres du système informatique résidait dans l’utilisation de câbles en acier, tandis qu’était prévue dans la notice descriptive contractuelle, l’utilisation de câbles en tôle ajourée.

Ayant relevé que dans le CCTP établi par le BET, un changement a été opéré pour des câbles en acier, elle en avait déduit que la SCI était responsable d’une « non-conformité contractuelle fondamentale », et le BET d’une erreur de conception dans la rédaction d’un CCTP qualifié par l’expert judiciaire de « méconnaissance des normes de compatibilité électromagnétiques »

Afin d’obtenir l’infirmation de l’arrêt d’appel, la SCI a soutenu que, même en admettant la réalité de la non-conformité contractuelle qui lui était imputable, elle demeurait d’après les constatations de la Cour d’appel non fautive, tandis que le BET avait quant à lui commis une véritable faute dans la conception du CCTP.

La Cour d’appel avait par ailleurs constaté que « cette erreur majeure s’est aggravée par divers défauts de mise en œuvre du CCTP imputables aux entrepreneurs en charge des travaux », relevant ainsi que ces derniers avaient commis des fautes.

Autrement dit, il était soutenu que la solution dégagée par l’arrêt d’appel avait pour conséquence que la SCI se trouvait tenue à réparer le dommage au titre d’une supposée non-conformité contractuelle, donc sans faute, tandis que les autres intervenants à l’acte de construire avaient quant à eux commis des fautes.

La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel sous le visa des articles 1646-1, 1231 et 1240 du Code civil.

Selon le premier texte, le vendeur d’immeuble à construire est tenu, de plein droit, des garanties légales des articles 1792 et suivants du Code civil

Selon le deuxième texte, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Enfin, le troisième texte prévoit que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il résulte de la combinaison de ces trois textes que le vendeur d’immeuble à construire condamné à réparation au titre d’une responsabilité de plein droit ne peut, dans ses recours contre les constructeurs, conserver à sa charge une part de la dette de réparation que si une faute, une immixtion ou une prise délibérée du risque est caractérisée à son encontre.

A titre d’illustration, la Cour de cassation a déjà eu l’occasion d’affirmer, sur le fondement de l’article 1792 du Code civil, l’exigence de caractériser une faute imputable à un vendeur en l’état futur d’achèvement ou son acceptation délibérée de risques dans ses rapports avec les locateurs d’ouvrage, pour laisser à sa charge une part de responsabilité au titre de l’étanchéité d’un parking (Cass. Civ. 3ème, 14 novembre 1991, pourvoi n° 90-10.050, Bull. 1991, III, n° 272).

Par conséquent, la Cour de cassation, confirmant en cela sa jurisprudence antérieure, a rappelé la nécessité de rapporter l’existence d’une faute, d’une immixtion ou une prise délibérée du risque à l’encontre du vendeur d’immeuble à construire, pour que ce dernier conserve à sa charge une part de la dette de réparation, ce qui n’était pas rapporté en l’espèce.

 

Chloé DUVIVIER

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